|
Mémoires de Pierre BEYER datées du 30 Juillet 1942. MÉMOIRES.
17 Juin, Journée qui restera à jamais gravée dans ma mémoire . C'était dans l'après-midi que les esprits furent les plus tendus à l'arsenal de Brest. Ouvriers, chefs d'équipe, ingénieurs avaient leurs visages des jours d'enterrements. Le bruit s'était répandu avec la rapidité de la foudre "Les boches sont à 50 Km de Brest, qui est déclarée ville ouverte; la France est battue".Alors avec une rage qui doublait leur force, ils jetèrent tout le matériel qui pouvait servir à l'ennemi dans la Penfeld. Et à 4 Heures on nous donna notre congé , congé définitif .
Je quittais l'arsenal à 4 Heures 20 regardant une dernière fois ces bâtiments que je ne verrai peut-être plus.
Je pris mon vélo, et je pris le chemin de la maison
En ville c'était la débandade. C'était à qui aurait un taxi , une place dans l'autobus, ou mieux une voiture de déménageur . Les groupes discutaient gravement sur les nouvelles du jour . Ils n'avaient qu'une pensée
"les Boches arrivent le lendemain, la guerre était perdue.
Les femmes pleuraient, les unes de désespoir , les autres de rage.
Je continuai mon chemin occupé par une seule pensée , bien définie, qui s'ancrait en moi "Partir pour continuer la lutte en Angleterre".
Arrivé chez moi, je racontais à ma mère les évènements , le renvoi de l'arsenal, l'arrivée des boches le lendemain .
Je lui dit mon intention de partir pour l'Angleterre . Elle n'y porta pas cas, et me dit que le lendemain je n'y penserai plus .
Le soir même je partai pour Lesneven où j'avais ma grand-mère , et des amis.
Je fis part de mon projet à quelques'uns qui acceptèrent de venir avec moi.
Le lendemain, à 10 Heures (18 Juin) nous partimes, munis de quelques provisions , dans un camion abandonné par les Anglais qui nous mena jusqu'à Saint Pol de Léon.
De là nous decidames d'aller à pied jusqu'à Roscoff. Arrivées à quelques kilomètres de Roscoff nous fûmes croisés par 2 motocyclistes qui crièrent "Les Boches nous suivent".
Nous primes aussitôt un chemin de traverse qui nous menait sur la grève.
Là nous fûmes survolés par un bombardier Boche volant à basse altitude.
Nous allâmes dans les rochers et là nous nous mimes a casser la croûte .
Nous arrivames à Roscoff d'où nous avions l'intention de nous embarquer pour l'Angleterre.
Il y avait à 1 ou 2 milles au large un navire de guerre au mouillage.
Comme un canot venait à terre faire les vivres nous lui demandames si nous pouvions embarquer en destination de l'Angleterre. Réponse négative ou "nous n'allons pas en Angleterre mais à La Rochelle.
Nous restames à Roscoff jusqu'à 4h du soir, ne perdant pas courage, croyant toujours que nous pourrions embarquer sur un navire.
En effet cela fut ainsi.
Un voilier Lituanien immobilisé depuis les hostilités en France servit à nos projets - 2 légionnaires, 2 marins de guerre et un groupe de 7 à 8 civils dont je faisais partie, décidèrent de réquisitionner le bateau pour leur propre compte.
Les autorités de la Ville nous opposèrent une faible résistance, mais furent vite remis à leur place par des gars bien décidés à ne pas se laisser faire.
Et nous partimes vers les 5 heures environ à destination d'un pays libre.
Le temps ne nous fut pas favorable, et c'est là que pour la première fois j'appris à connaître le mal de mer
Le lendemain dans la soirée nous arrivons à Falmouth où nous attendons le lendemain pour être débarqués.
On nous amena dans un théâtre réquisitionné à notre effet.
Nous fûmes mêlés à toutes personnes de toutes nations, et c'est là que je fais connaissance avec la langue anglaise, c'est à dire que je réussissais à me faire comprendre par signes.
Le lendemain nous partions pour Londres , la capitale la plus louche de monde, je l'appris par la suite.
Nous allâmes à Fulham Insitution où je revis les copains de l'arsenal .
Nous restames là 5 jours d'où nous fûmes dirigés sur "Cristal Palace" magnifique bâtisse de glaces dans la banlieue de Londres.
Notre séjour dura 3 jours. Là nous apprimes que le Général De Gaulle groupait sous ses ordres les Francais qui ne s'avouaient pas vaincus.
Nous allâmes ensuite à, Olympia Hall où était le dépôt des "Forces Françaises Libres".
Je demandai d'abord l'aviation, mais je changerai d'avis par la suite je pris la marine.
Je restai là une semaine environ et comme j'étais trop jeune pour combattre l'on m'expédia au Pays de Galles où était installé un camp de scouts français .
Je restai là 15 jours et l'on m'expédia sur l'Olympia.
Le lendemain je partis à Porstmouth sur le cuirassé Courbet .
Je fis 3 mois de fusilier et j'embarquai le 20 Octobre 1940 sur le "Chasseur Ca010" d'où j'écris livre.
Fait à Southampton le 30 Juillet 1942.
Signé Pierre BEYER. BEYER Jean-Pierre le lundi 16 janvier 2017 Contribution au livre ouvert de Pierre Marie Beyer | |