Contributions - Les Français Libres

Les Français Libres, de juin 1940 à juillet 1943

 
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Extrait (pour le plaisir)

Au matin, manœuvre de chars et d'autos blin­dées. Du point de vue touristique, c'est une pauvre affaire, à travers un désert sans intérêt, borné par les tourbillons de poussière, et qui ne ressemble en rien à un champ de bataille. C'est un travail mo­notone auquel je ne comprends goutte, bien que je me refuse à en convenir. Le commandant de Kersauson a l'air, par le capot de sa tourelle, d'indiquer les directions avec un chasse-mouches rouge. Le capitaine Morel-Deville qui, en temps de paix, aimait à conduire en laisse un tigre appri­voisé, conduit avec confiance ces monstres de fer par radio, et moi, dévorant la poussière, je me recroqueville, inutile parasite, au cœur d'un char, tandis que, des écouteurs du casque téléphonique à mes côtés, s'échappent de mystérieux messages en code.

— Allô Beck! Allô Beck! Ici Moux. Message pour vous : arsenic, sulfate, oignon, terminé.
— Allô Moux ! Ici Beck. Tu parles comme un eil. Message pour vous. Aspirine. Noël, Noix...

Après une douzaine de communications de ce genre, je commence à me demander si la guerre n'est pas chose trop compliquée pour de simples gens de ma sorte. Je regarde avec respect mes compagnons qui m'ont l'air d'être gens experts en calculs mathématiques, et je regrette les jours de la baliste, de l'arbalète et du coup de poignard dans le noir. J'ai empoisonné tout le monde, du Congo jusqu'au Caire, pour obtenir une chance d'aller me battre, et maintenant je découvre qu'il me manque la formation militaire indispensable pour prendre part à cette guerre moderne, si com­pliquée. Je suis un imposteur et je n'arrive pas à me consoler en pensant que je pourrai, malgré tout, écrire des livres qui aideront plus que mon uelion de guerre mes amis de la France combattante. C'est abattre de l'Allemand que je désire et, celle nuit, je n'en dors pas, craignant que ces gaillards-là ne me croient incompétent ou peu sincère. Ce qui m'embarrasse, au surplus, c'est la sensa­tion qu'à 36 ans je dois leur paraître vieux et pré­tentieux. Et, bien que les Américains demeurent pour eux l'allié favori, je n'en demeure pas moins un étranger.

Des avions de chez moi, des avions d'Amérique passent en groupes de 40 à 50 au-dessus de nous, en route pour aller prêcher la crainte du Seigneur chez Rommel, et je me sens excusé. Il me semble être le serviteur d'une maison riche, dînant dans un restaurant médiocre avec les serviteurs d'une vieille famille française tombée dans la misère.

Laurent Laloup le vendredi 20 juillet 2007

Contribution au livre ouvert de Hassoldt William Davis

Montrée dans le livre ouvert de 2 Robert Henri de Kersauson de Pennendreff | 3 François René Marie Roger Morel Deville

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