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Henry-Robert HELENON est né à Fort de France (Martinique) le 13 octobre 1924. La Martinique est alors une colonie française dirigée par un gouverneur civil. Cependant, après l'entrée en guerre de la France contre l'Allemagne, le gouvernement de la IIIe République délègue à Fort de France, avec autorité sur la Guadeloupe, l'amiral Georges ROBERT, avec les fonctions de Haut Commissaire de la République aux Antilles. Ses pouvoirs sont très importants, et les gouverneurs SORIN à la Guadeloupe et NICOL à la Martinique sont très dépendants de lui.
Avec le régime de Vichy, institué dès le 10 juillet 1940, les Antilles françaises sont entièrement soumises aux lois pétinistes qui prônent la « révolution nationale ». Bien évidemment il est très dangereux de laisser paraître ses sympathies pour la dissidence gaulliste et ceux qui, imprudemment, se font surprendre par des paroles rapportées aux autorités ou des actes, tels que le signe V tracé sur un mur ou sur les ailes de son automobile, se retrouvent, parfois sans jugement, à fond de cale d'un bateau-pénitencier en rade de Fort de France ou encore déportés aux îles du Salut ou au Fort Napoléon, aux Saintes.
Rapidement l'air, aux Antilles, devient irrespirable. Pour les jeunes gens qui ont entre 16 et 21 ans, cette situation est insupportable. Par les nouvelles qui arrivent à filtrer, ils ont appris le débarquement allié en Afrique du Nord les 8 et 9 novembre 1942; la chute de Stalingrad le 30 janvier 1943, les revers allemands en Russie à la fin de l'hiver 1942-1943. Depuis plus d'un an déjà, de jeunes Martiniquais s'embarquent clandestinement, le plus souvent de nuit, pour les îles anglaises de la Dominique ou de Sainte Lucie et, une fois là-bas, s'engagent dans les Forces Françaises Libres.
A la fin du mois de mai 1943, Henry-Robert HELENON décide de partir à son tour et de rejoindre la dissidence gaulliste. Avec trois autres compagnons, il vole une petite embarcation de pêche, appelée là-bas, « un gommier » et par une nuit sans lune il gagne les côtes de la Dominique. Une fois arrivé à Roseau, il lui faudra attendre le passage d'une goélette à destination de Trinidad pour souscrire son engagement dans les Forces Françaises Libres. A Port of Spain, un agent du général de Gaulle, Pierre ADIGARD des GAUTRIES, ancien commissaire de la Compagnie Transatlantique, lui fait signer son contrat d'engagement pour la durée de la guerre plus trois mois.
Ensuite, il faut attendre qu'un bâtiment de la marine U.S. viennent chercher les nouveaux futurs combattants pour les transporter à Norfolk, en Virginie, d'où ils seront dirigés en train à Fort Dix, dans le New Jersey, à proximité de Philadelphie où les impétrants recevront une formation militaire très poussée de plusieurs mois, avant d'être admis (ou refusés) dans le Bataillon de Marche des Antilles n°1 constitué aux Etat-Unis en octobre 1942.
Henry-Robert HELENON, qui a 18 ans et est en bonne santé, franchit toutes les épreuves de l'entraînement et le 24 septembre 1943 il quitte le port de Norfolk avec un convoi de nombreux bâtiments transportant plusieurs milliers d'hommes, à destination de Casablanca au Maroc où les navires accostent le 12 octobre. De là, il est transporté en train à Meknès d'où il rejoint à pied le camp d'El Hajeb dans le Haut Atlas.
Le capitaine Etienne FLORENT, un officier originaire de Sainte Marie (Martinique) qui voit tous ses compatriotes antillais arriver dans ce camp (un peu plus d'un millier), craint qu'ils ne soient dispersés dans une multitude d'unités de l'armée de terre et perdent ainsi leur cohésion. Il intervient auprès des chefs de la 1ère Division Française Libre (lui-même étant Français libre), et obtient que les Antillais soient regroupés au sein d'un Groupement Antillais de Défense Contre Avions qui serait intégré à la 1ère D.F.L.
Le 10 décembre 1943, les Antillais du B.M.A. 1 passent la frontière algéro-tunisienne, arrivent à Kairouan et le 18 janvier 1944, cette unité est dissoute pour former le 21e G.A.D.C.A. qui participera dès lors à tous les combats de la 1ère Division Française Libre.
Le 2 mai 1944, le Groupement est débarqué à Naples, faubourg de Bagnoli et sera rapidement dirigé sur Cassino où vient d'être livrée une très dure bataille pour la conquête des hauteurs verrou de la route de Rome. Il y aura plusieurs tués et blessés parmi les hommes du G.A.D.C.A.
Puis, début août, la 1ère D.F.L. et le 21e G.A.D.C.A. quittent le front d'Italie et par les ports de Brindisi ou de Tarente sont rassemblés en mer en vue de prendre part au futur débarquement sur les côtes de Provence.
Henry-Robert HELENON sera de ceux qui débarqueront à l'aube du 16 août 1944, sur la plage de Cavalaire. Après la prise d'Hyères, de Toulon et de Marseille, les Amércains, la 1ère Armée Française du général de Lattre de Tassigny avec les Forces Terrestres Antiaériennes de la 1ère D.F.L. sous le commandement du général de division Diego BROSSET, remontent la vallée du Rhône, atteignent Lyon, puis la Porte de Bourgogne et Belfort.
L'hiver est arrivé plus tôt que prévu. Les soldat antillais souffrent, plus que tout, du froid.
Dans la forêt des Vosges où le 21e G.A.D.C.A. est stationné, aux avants postes de la ligne de front, Henry-Robert HELENON se réveille un matin avec un pied gelé. Le capitaine FLORENT qui vient s'enquérir de la gravité des gelures et veut le faire évacuer (un autre Antillais, l'artilleur Henri COQUILLE de MONTCOURT devra être amputé des deux jambes et mourra sur la table d'opération de l'hôpital de Dijon), s'entendra répondre: « Mon capitaine, je préfère être de la patrouille, j'aurais honte autrement et puis le mouvement sauvera mes orteils ».
HELENON finira cependant par accepter l'évacuation, ce qui sauvera son pied. Hospitalisé, il sera soigné pendant deux mois mais gardera toute sa vie les séquelles de ces gelures.
Après la guerre, il sera rapatrié à la Martinique en septembre 1945 où il est démobilisé.
Henry-Robert HELENON est décédé à Fort de France le 5 septembre 2008. Il était titulaire des décorations suivantes :
- Médaille militaire (décret du 8 décembre 1999, J.O. du 10 décembre 1999, page 18409)
- Croix du Combattant
- Croix du Combattant volontaire guerre 1939-1945
- Croix du Combattant volontaire de la Résistance
- Médaille commémorative des Services volontaires dans la France Libre
- Médaille commémorative française 1939-1945 avec barrettes: Engagé volontaire, Atlantique, Afrique, Méditerranée, Libération
- Médaille commémorative de la campagne d'Italie
- Médaille des évadés
- Insigne des blessés
- Insigne des Forces Françaises Libres
www.memoresist.org
Auteur de la fiche :
François CARTIGNY
Commentaire de l'auteur
Sources : Les dissidents des Antilles dans les Forces Françaises Libres Combattantes 1940-1945, par Lucien Abénon et Henry Joseph (publication de l'Association des Dissidents de la Martinique, Fort de France, mai 1999) Et entretiens de l'auteur avec Henry-Robert HELENON en 2005 et 2006. E-mail du 27 septembre 2008 Laurent le vendredi 07 mai 2010 - Demander un contact Recherche sur cette contribution | |