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" Article de Georges Marchand
L’AMIRAL PAUL GALLERET,
NIVERNAIS DE VARZY.
Existence particulièrement longue et bien remplie que celle de Paul Galleret décédé en 2001, à l’âge de quatre-vingt-dix-neuf ans après avoir, durant quarante-deux années, loyalement servi la marine nationale et manifesté une indéfectible fidélité à l’égard du général de Gaulle dont il fut, en des temps difficiles, un collaborateur de l’ombre apprécié.
Paul Galleret a vu le jour le 21 juillet 1902, à Varzy, bourgade nivernaise de deux mille cinq cents habitants, sur le déclin, qui s’enorgueillit de posséder un musée municipal (1) et d’accueillir depuis 1861 l’Ecole Normale d’Instituteurs de la Nièvre. (2)
Son père, François, homme affable, disponible pour ses proches, appartient à la bourgeoisie locale. Il gère un important portefeuille d’assurances tout en exerçant la profession de géomètre-expert.
Sa mère, Clotilde Laîné, se révèle une femme au caractère bien trempé, assez autoritaire, nourrissant de réelles ambitions pour ses deux fils Paul et Georges.
C’est dans la vaste demeure du boulevard Dupin que se déroule l’enfance de Paul Galleret. Celui-ci fréquente l’école primaire, annexe de l’Ecole Normale d’Instituteurs, où il bénéficie de la compétence de deux instituteurs chevronnés, MM. Niaudet et Normand. Il découvre dès son jeune âge, le musée local et rêve de lointains voyages à la vue des objets insolites rapportés d’Océanie par l’amiral Jacquinot, compagnon du navigateur Dumont d’Urville. (3)
Les liens privilégiés que tisse Paul Galleret avec le fils du notaire voisin, Romain Rougelot, scelleront sa destinée. Le jeune garçon manifeste une profonde admiration à l’égard de ce « grand aîné », devenu marin, qui lors de ses rares permissions lui conte ses expéditions en Tunisie, à Madagascar ou au Dahomey. Lors des obsèques de Romain Rougelot, alors capitaine de corvette, décédé en 1910 (4), Paul Galleret prend la décision de devenir marin.
Puis ce sont, pour ce dernier, des études secondaires à l’institution Saint Cyr de Nevers. Bachelier, le Varzycois intègre le lycée parisien Saint Louis où il prépare avec succès le concours d’entrée à l’Ecole Navale. Il y côtoie Antoine de Saint-Exupéry, son cadet d’une année, qui n’étant pas admissible, bifurquera vers l’aviation.
Ce n’est que le 1er octobre 1921, alors âgé de dix-neuf ans, que Paul Galleret découvre enfin la mer à Brest. Quant à son frère Georges, son admission à l’Ecole Polytechnique lui vaudra d’exercer plus tard, d’importantes fonctions au sein du groupe Thomson.
En 1923, Paul Galleret quitte l’Ecole Navale, avec le grade d’enseigne de vaisseau de seconde classe et embarque à bord du « Jeanne d’Arc ». Sa carrière qui connaîtra une progression normale, le voit accéder en 1929 au grade de lieutenant de vaisseau. Breveté transmetteur après avoir fréquenté l’école des officiers de transmission à Toulon, il appartient à l’encadrement du cuirassé « Jean Bart » puis est affecté à la base aéronautique maritime de Cherbourg et rejoint l’état-major de la première région maritime.
Il se retrouve en 1937, officier en second de l’aviso colonial « Bougainville » stationné à Djibouti.
A la veille du second conflit mondial, devenu capitaine de corvette en 1939, il dirige les transmissions à l’état-major du préfet maritime de la seconde région.
En 1940, il appartient à l’équipage du « Courbet », un cuirassé datant de 1911, affecté à la défense de Cherbourg qui rallie les ports anglais après l’armistice du 22 juin et sera saisi le 3 juillet 1940 à l’issue des événements de Mers el-Kébir (5) et de l’opération « Catapulte ». Comme ses camarades marins, Paul Galleret est interné dans un camp anglais. Trois options s’offrent à lui : rallier la France Libre, regagner l’hexagone ou s’engager dans la Royal Navy.
C’est alors qu’il rencontre un ancien jésuite, l’abbé Olphe-Galliard (6), aumônier de la marine qui lui fait part de la haute estime dont bénéficie en France, dans l’armée de terre, le général de Gaulle. De plus, ayant lu l’un de ses ouvrages, il lui dit combien il a été frappé par la puissance de la pensée comme de la maîtrise du langage de l’homme du 18 juin 1940. Pour l’ecclésiastique, posséder à leur tête un chef d’une telle envergure, se révèle une chance pour les Français libres.
Convaincu par ces propos, Paul Galleret décide le 9 octobre 1940 de rejoindre le général de Gaulle sans ignorer l’admiration que sa famille voue au maréchal Pétain. (7)
Cette décision, lourde de conséquences, vaudra à notre compatriote d’être condamné, le 8 juillet 1942, par le tribunal maritime permanent de Toulon « à vingt ans de détention par contumace, autant d’interdiction de séjour, dégradation militaire, confiscation de solde et mise sous séquestre des biens. » (8)
Désormais, la carrière de Paul Galleret se poursuit à Londres où d’octobre 1940 à janvier 1941, il commande en second le contre-torpilleur « Le Triomphant », confié au capitaine de vaisseau Auboyneau. Il est ensuite désigné comme sous-chef d’état-major des forces navales de la France Libre, de janvier 1941 à avril 1942. Il sera notamment l’interlocuteur privilégié de Philippe Kieffer, qui lui présente son projet de création d’un bataillon de fusiliers marins commandos. Le capitaine de vaisseau Paul Galleret favorisera la concrétisation de cette initiative. (9)
Durant cette période, il jouera un rôle non négligeable, voire déterminant, lors de la crise majeure ayant menacé, en mars 1942, l’existence de la France Libre. Il apportera, en effet, son efficace contribution à l’échec de la conjuration ourdie par le vice-amiral Emile Muselier (10) commandant les forces navales et aériennes françaises libres, le capitaine de vaisseau Moret, alias le commandant Moullec, le journaliste André Labarthe et l’Anglaise Marie-Alix Michaelis, très populaire chez les marins en raison de ses prodigalités. Pour les conjurés, il s’agissait de discréditer le général de Gaulle auprès des autorités anglaises, de rendre impossible la poursuite de sa mission et de le remplacer par l’amiral Muselier à la tête de la France Libre.
Au cœur des événements, le 11 mars 1942,, lors d’une réunion déterminante, Paul Galleret, devenu accusateur public, prendra vivement à partie le commandant Moullec, lui reprochant aves véhémence d’avoir constamment envenimé les rapports entre le général et l’amiral, favorisant ainsi la scission du mouvement. Cette attitude courageuse provoquera le retournement de plusieurs officiers et contribuera à conforter la position du général de Gaulle qui dans les semaines suivantes transformera la France Libre en France Combattante « trait d’union entre tous ceux qui luttent contre l’envahisseur ». ..." Laurent Laloup le samedi 09 septembre 2017 - Demander un contact Recherche sur cette contribution | |