Histoires de Français Libres - El Alamein - Longue Marche

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El Alamein

 

Dans "Les Compagnons de la Longue Marche"

 

Page 77

En arabe, alamein signifie "les drapeaux". Le lieu marque le souvenir d'un fort turc sur la colline, dressé contre les nomades sénoussi venus du Sahara, la terre désolée.

Je ne suis heureusement plus motocycliste, mais tireur sur une A.M. du 3e peloton, avec le sous-lieutenant Kochanowski, toujours fantasque et volubile, une badine à la main et une cigarette à la bouche.

Le G.R. 2, sous les ordres du chef d'escadrons de Kersauson, avec les escadrons de Morel-Deville et de Troquereau, renforcé par la compagnie de chars crusaders du capitaine Daniel Divry, et un peloton de Légion avec un sous-lieutenant, forment toute la Free French flying column qui se joint à la 7e division blindée britannique, les Desert rats.

Montgomery, dit Monty, est un chef charismatique, habillé comme ses hommes et très près d'eux. Il rend souvent visite à ses unités et, je ne sais pourquoi, un lien fort avec son chef rend son armée invincible. Le triomphe de l'esprit sur la matière. En fait, el Alamein, comme le Rhin, sépare deux armées de force à peu près égale, mais peut-être animées d' une foi inégale. De notre côté, la foi en la victoire était inébranlable.

Avec de nouvelles A.M., malheureusement à peine meilleures que les anciennes, il n'y a que la foi qui sauve. Nous procédons par petites étapes vers le Sud du dispositif, au Nord de la dépression de el Qatara, lac salé en dessous du niveau de la mer et réputé infranchissable. Il sera franchi, mais faiblement, sans lendemain. Nous patrouillons, pour plus de sûreté, dans ce secteur sud.

Ce mois d'octobre 1942 restera dans les annales de l'Histoire comme un tournant décisif, mais sur mon blindé ce n'était que mon premier grand combat. Une dernière halte dans le sud pour un repos bien mérité, le calme avant la tempête...

Paul Willing, le plus british des Free French, me dit : "Il faut que nous couchions sur notre battle dress, pour qu'il soit bien repassé et que nous soyons propres pour l'attaque". Toujours impeccable, il fut mon modèle dans le désert. Il me rappelle Chocolat : "Les tueurs tuent au coeur les ennemis qu 'ils respectent pour qu 'ils soient propres dans leur cercueil." J'espère que mon blindé ne sera pas mon cercueil.

Je suis le conseil de Paul. On me réveille tard dans la soirée. J'ai toujours bien dormi avant les attaques, ne me rappelant jamais mes rêves ou mes cauchemars, du sommeil du juste ou de l'inconscient, sans doute identiques... Dans la soirée, contre toute attente, Montgomery décide d'attaquer pendant la nuit, comme le génial Cao Cao, chef de bande sous les Han en Chine. L'artillerie déclenche, sous la pleine lune, un feu nourri qui éclaire cette nuit d'octobre dans le désert.

Nous devons prendre le piton d'Himeimat. N'étant pas dans le secret des dieux, je suis roue dans roue le blindé de tête à travers les champs de mines. Dans la nuit éclairée, je me rappelle les légionnaires de la 13 D.B.L.E. au petit trot à travers les mottes de sable et les herbes à chameaux, grandioses et irréels. Mais dans la soirée nous ne sommes pas encore repérés; en tout cas personne ne nous tire dessus.

Malgré ses efforts, la Légion ne peut escalader la montagne et aborder le plateau, les Bren carriers s'enlisant sur la pente. Au petit matin nous restons au pied de la falaise. Les obus ennemis passent au-dessus de nos têtes sans grands dommages, mais nous ne pouvons ni avancer ni reculer. Les Allemands règlent leurs tirs et nous sommes obligés de décrocher durant la nuit. L'adjudant Candy et le chef Féron sont tués, et leurs corps ramenés comme il se doit. Mon blindé fut éraflé et je perdis une partie de mon paquetage. Je vois mon camarade de Tian Jin, Paul Colinet, le béret de travers, qui me dit : "Mon A.M. a reçu un obus juste sous mon siège." C'est le cas de dire qu'il a eu chaud aux fesses !

En décrochant, j'ai vu à côté de moi, à l' "escarpement post", le colonel géorgien Amilakvari, tué par un obus, et transporté sur le char de Touny, je crois...

L'opération de diversion a parfaitement réussi, en attirant Rommel vers le Sud et permettant à Montgomery d'attaquer par le Nord. Comme Napoléon, faire diversion... Kersauson fut remplacé par Rémy, un Breton par un Russe. C'est décidément une guerre mondiale. Son second fut le commandant Roumiantzov, dit "le Roum", avec qui j'eus par la suite des liens privilégiés en Tunisie.


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