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Une Française libre, de Tereska Torrès " Si bleu, si blanc, si rouge, dans le ciel clair au-dessus du QG. De toutes les rues débouchent des visages connus : le commandant Kief, qui marche si drôlement parce qu'il a les pieds plats, la secrétaire du professeur Cassin, qui se presse, une VF chauffeur, au volant de sa voiture, Mlle Merlange, très droite, boiteuse, qui, paraît-il, dit d'elle-même : « Je suis un grand lys noir ! », le lieutenant Galois Mombrun, toujours tiré à quatre épingles. On se dit bonjour comme à Paris : « Quel beau temps, n'est-ce pas ? » ou « Toujours du vent dans ce sale pays. » L'ascenseur. Le liftier manchot : « Good morning, lovely day; isnt'it?» «Third floor, please. » Mon bureau. Je me pince. Est-ce bien moi, l'enfant de Marie, la présidente jéciste, la petite fille d'Héas ? Est-ce bien moi qui suis cette volontaire française en uniforme kaki, assise sagement à mon bureau, entre un fichier, un téléphone et une pile de dossiers ? Est-ce moi qui lis des télégrammes marqués « secret » en grosses lettres violettes, qui, un papier à la main, vais frapper à la porte du bureau d'état-major du Général, est-ce moi qui discute au service financier les dons du Brésil, qui passe demander un renseignement à l'Information, qui téléphone à la Guerre de la part du lieutenant d'Ollondes ? Est-ce moi ?" Laurent Laloup le lundi 23 février 2009 - Demander un contact Recherche sur cette contribution | |