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Philippe Baratay Témoignage du 18 mars 2004 au Savoie-Léman devant des élèves.
J'ai rejoint le Général de Gaulle le 24 juin 1940
Me trouvant au camp d'entrée (Liverpool) par suite du naufrage de mon bateau en mer du Nord fin mai 1940, le 19 juin, ayant été informé par les militaires anglais de l'appel du Général, j'ai répondu à cet appel et le 24 juin j'étais à Londres (Olympia) où le Général nous a rendu visite (nous étions 7).
Après un court séjour dans un camp, Camberlay au Sud de Londres, j'ai embarqué sur le cuirassé Courbet à Portsmouth, servant de dépôt des équipages.
A cette époque, une cinquantaine de bâtiments de guerre français se trouvaient dans les ports en Grande-Bretagne. Les équipages obéissant aux ordres du gouvernement de Vichy, ils ne continuèrent pas le combat.
Lorsque le gouvernement anglais à compris que les marins français, dans leur majorité, refusaient de continuer le combat, décida de saisir ces navires, d'immobiliser l'escadrille d'Alexandrie et de détruire celle de Mers-el-Kebir, pour éviter que ces bâtiments tombent aux mains des allemands. Les marins qui se trouvaient en Angleterre furent transférés dans des camps, en attendant d'être rapatriés.
Il est évident que ces trois opérations n'ont pas facilité le ralliement de ces équipages aux Forces Navales Françaises Libres.
A la fin juillet, nous étions quelques centaines sur le Courbet (ce qui nous a permis d'armer quelques navires, particulièrement des avisos, chasseurs de sous-marins). Personnellement, j'ai embarqué sur le "Chevreuil" avec lequel j'ai rejoint Greenoch en Ecosse (surveillance des côtes et convois.
Après avoir perdu la bataille aérienne d'Angleterre, les allemands portèrent tous leurs efforts pour empêcher le ravitaillement en armes de ce pays. Ils lancèrent de nombreux sous-marins à l'attaque des convois venant d'Amérique et du Canada. Les pertes furent très importantes.
A partir de 1941, par suite de l'arrivée en Grande-Bretagne de nombreux marins français volontaires dans la France Libre, les anglais mirent à notre disposition plusieurs bâtiments de guerre, en général des cargos assez rapides, genre bananiers spécialement équipés pour la chasse anti sous-marine.
Ces bâtiments furent rapidement affectés aux escortes des convois de l'Atlantique où ils se distinguèrent en coulant plusieurs sous-marins allemands, l'un d'entre eux (l'Aconit) fit l'exploit d'en couler deux le même jour.
Cette bataille de l'Atlantique fut très meurtrière, 2603 navires de commerce furent coulés, ainsi que 175 bâtiments de guerre. Pour les allemands, 789 sous-marin furent mis hors de combat.
Les pertes en vies humaines ont été également nombreuses, chez les allemands 20.080 morts et plus de 5000 prisonniers. Pour les alliés, plus de 30.000 morts parmi les marins de commerce et plusieurs milliers sur les bâtiments de guerre, dont près de 500 français libres.
Pendant ce temps, les sous-marins F.M.F.L. basés à Dundee, au Nord de l'Angleterre, coulèrent plusieurs cargos allemands chargés de ravitailler leurs troupes en Norvège.
Nos escorteurs participèrent également aux convois de Russie (convois très pénibles pour les équipages). Partant de l'Islande pour rejoindre Mourmansk en Russien ils devaient s'éloigner le plus possible des côtes norvégiennes où les allemands avaient plusieurs bases d'aviation et leurs navires de guerre dans les fjords de ce pays.
Ces convois longeaient la banquise souvent dans des bancs de glace, par un froid très vif. Fréquemment attaqués, surtout par l'aviation, les équipages avaient peu de repos.
Néanmoins, ces ravitaillements ainsi que par voies terrestres (Iran), permirent de livrer des milliers d'avions, chars, canons et autres armements, ce qui aida les russes à stopper l'avance allemande.
Quelques unités de notre marine participèrent au débarquement, particulièrement la Combattante qui venait de s'illustrer en coulant 3 bâtiments ennemis et en endommageant plusieurs autres (vedettes lance torpilles).
C'est à bord de cette unité que le Général de Gaulle débarqua en Normandie. Malheureusement ce bateau heurta une mine et coula quelques temps après.
En fait de reconnaissance le Général de Gaulle adressa à tous les marins de la France Libre le message suivant :
"La vague ne détruit pas le granit, vous les marins de la France Libre, ce que vous avez fait pour la France en poursuivant la lutte sur la mer, envers et contre tout, dans le plus grand drame de notre histoire. Rien, ni le temps, ni les passions ne l'effaceront jamais. Je vous salue mes camarades" signé CHARLES DE GAULLE
Nous, anciens des Forces Françaises Libres sommes fiers d'avoir servi sous les ordres d'un tel général, dont la seule ambition était la libération de notre pays et de redonner à la France sont rang dans les grandes puissances, malgré les nombreux obstacles dressés sur sa route. 
Laurent Laloup le vendredi 15 juin 2007 Contribution au livre ouvert de Philippe François Baratay | |