Histoires de Français Libres - Bataille de Médenine - Et bérets noirs

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Bataille de Médenine

 

Dans "Calots rouges et bérets noirs"

 

Le 26 février 1943, la Colonne Volante franchit la frontière tunisienne et va bivouaquer pendant quelques jours à Ben Gardane pour remettre son matériel en état avant d'être engagée. Pour la plupart d'entre nous c'est le premier contact avec une terre française depuis près de trois ans. Ce contact est un peu décevant.

La population indigène nous regarde avec indifférence. La seule chose qui semble l'intéresser c'est la quantité de thé qu'il est possible d'obtenir de nous en échange de quelques oeufs ou d'un poulet rachitique. La guerre n'intéresse les Tunisiens qu'autant qu'elle constitue une source de profits. Grâce aux échanges ou à la rapine ou à d'autres actions plus dangereuses mais aussi plus lucratives : on trouve sur les pistes des telles mines ou des mines de bois posées de nuit par des mains inhabiles mais intéressées.

A Ben Gardane, il n'y a pratiquement pas de Français. Seuls deux officiers des affaires indigènes viennent nous voir plutôt en curieux qu'en camarades, heureux de trouver des compagnons qui ont eu la chance de combattre. Ils sont affublés de casquettes et pattes d'épaules brodées d'or qui leur donnent un vague air d'officiers italiens endimanchés. Ils ne savent quelle attitude prendre à notre égard car depuis plus de trois mois ils n'ont aucune liaison avec leurs chefs. Un drame de conscience épouvantable les déchire. Ils se souviennent qu'ils ont officiers et sont attirés vers les combattants (pas nous les dissidents, mais les vrais, ceux qui sont allés au combat sur l'ordre de Darlan). Cependant, ils n'oublient pas qu'en tant que fonctionnaires de la Résidence, ils dépendent de l'Amiral Esteva qui, lui, est resté à Tunis et continue à collaborer avec les Allemands. Où est la vérité ? Sous le képi ou sous la casquette ? Au cours du dîner à la popote, ils nous avouent que s'il n'y avait pas eu le 8 novembre et si la VIIIe Armée s'était présentée à la frontière sur les talons de l'Armata Corrazata Italo Tedesca, ils nous auraient probablement reçus à coups de fusils.

Nous laissons partir les deux larves toujours en proie à leur drame intérieur que nous refusons de qualifier de cornélien. Mais l'impression produite reste pénible. Quelqu'un résume l'opinion généra1e Nom de... ! Si tous les Français sont comme ceux là! Et il ajoute le cri de guerre des spahis : "Mort aux...!"

Heureusement nous nous rendons compte rapidement que les deux spécimens, abrutis par le soleil de Ben Gardane et la propagande de Vichy constituent une exception.

Le lendemain nous faisions une visite à Monsieur A. D., à Zarzis. C'est un fin homme de lettres et un explorateur qui a parcouru l'Afrique et l'Asie avec des expéditions qui furent célèbres en leur temps. Il écoute pensivement quelques histoires que lui raconte notre toubib et lorsque nous prenons congé, nous dit : "Oui, vous avez fait de belles choses pendant que nous croupissions dans l'abrutissement de l'Armistice".

Quelques jours après, nous avons d'autres contact avec des officiers des Affaires Indigènes, le lieutenant interprète, le Capitaine M..., du Poste de Fouin Tatahouine et d'autres. Ils se mettrent en quatre pour nous aider, nous donner des renseignements sur le pays, nous procurer des guides et même des agents sûrs qui nous rapportent des renseignements sur ce qui se passe chez l'ennemi. Nous apprenons que. d'autres se sont mis spontanément à la disposition du Général Leclerc qui bivouaque à Ksar Rhilane, au pied du Grand Erg Oriental. Quelques volontaires nous rejoignent, tel le sergent D...  qui, à bicyclette, fait le trajet Djerba-Foum Tatahouine et arrive juste à temps pour prendre le commandement d'un groupe de combat de spahis portés au combat de l'oued Gragour. Tout ceci nous réconcilie avec les habitants de Tunisie. La vie est belle, il y a de l'espoir et nous avions raison de ne jamais douter de la France.

Cependant, nous ne sommes pas venus en Tunisie pour mener de stériles discussions sur l'utilité de l'Armistice de Juin 40 ou astiquer la giberne en racontant nos prouesses passées. Le Commandant de la Colonne Volante se rend au P.C. du Général Montgomery pour se présenter au Commandant de la VIIIe Armée, solliciter l'honneur d'être de nouveau engagé au combat. Dans le fond de l'oued qui abrite la "caravane" de Monty, il rencontre le Général Leclerc, venu également en liaison. Le Général Mongomery fait part aux deux officiers de son intention de réunir prochainement les deux formations françaises sous les ordres du Général Leclerc. Mais ceci ne sera réalisé que plus tard, après que l'imminente contre-offensive de Rommel aura été repoussée. En attendant, la Colonne Volante est mise à la disposition de la 4e Brigade Blindée Légère.


Automitrailleuses Marmon Herrington

Le 1er mars, la Colonne Volante prend sa place dans le dispositif de couverture du 30e C.A. à l'ouest de Ghomrassen. Elle effectue quelques patrouilles sur les pentes sud et ouest du Djebel Matmata, sans toutefois trouver le contact de l'ennemi qui occupe les hauteurs inaccessibles aux blindés.

Le 3, la Colonne Volante reçoit l'ordre de relever dans l'oued Gragour un escadron de King's Dragoon Guard et couvrir la route Médénine Foum Tata houine à hauteur de Bir Ahmar. Ainsi elle aura à protéger le flanc du 30e C.A. dont les éléments les plus proches se trouvent près de Médénine, à neuf kilomètres au nord de Bir Ahmar.

Dès la relève accomplie la Colonne Volante envoie des patrouilles dans les lits des oueds desséchés qui pénètrent profondément dans la montagne et qui seuls permettraient à l'ennemi de déboucher dans la plaine de Médénine.

Le 5 mars, dans la matinée, la patrouille du Lieutenant C..., est accrochée alors que son chef pour suivait avec quelques spahis à pied ses investigations. Le spahi P... est ramené avec une balle dans le bras. Il jure de passer son temps à l'hôpital à "viser le point marqué" car l'Allemand sur lequel il a tiré n'a pas été blessé et a pu le blesser en ripostant.

Le 6 mars, à six heures, le détachement du Capitaine T..., en surveillance sur la piste de Bir Ahmar, monte vers Beni Kredach, signale des bruits de chars dans un des ravins situés à l'Ouest. Toute la colonne est alertée et le renseignement est transmis à la patrouille O... qui opère toujours au sud-ouest du gros. Un détachement comprenant deux sections de chars et un peloton d'autos-canons est envoyé sous les ordres du Commandant R..., au débouché Nord de l'oued Gragour. En meme temps le Capitaine T... signale qu'il est aux prises avec de nombreux blindés ennemis qui débouchent du massif montagneux et l'obligent à se replier en direction de la route de Médénine.


Bataille de Médénine le 6 mars 1943

Le Commandant de la Colonne Volante se rend compte que l'ennemi se propose de couper la route Médénine-Tatahouine. Le détachement du Capitaine de C... est envoyé à Bir Alimar pour interdire cette route, pendant que le gros de la colonne se regroupe à l'endroit où l'oued Gragour débouche dans la plaine. Une reconnaissance de chars est arrêtée par le tir des 75 PAK. Cependant les six pièces de 75 des deux pelotons d'autos-canons ouvrent un feu précis sur les véhicules ennemis qui défilent à quelque quatre cents mètres de nous. Des camions, des chars, des autos-moteurs flambent. La confusion règne chez l'ennemi dont la tête est prise à partie par les AC du détachement de C..., et le flanc par les chars du Capitaine Divry, et les autos canons des deux pelotons abrités dans l'oued Gragour. Bientôt son mouvement s'arrête, les véhicules vont s'abriter dans les plis du terrain et les 88 entrent en action. Un long duel s'engage. De nombreux véhicules ennemis sont atteints et brûlent en dégageant une épaisse fumée noire. Deux de nos chars et deux autos-canons sont également touchés.

Le char du sergent A..., le blessé aux yeux d'EI Himeimat, est immobilisé par un coup de 75 PAK et brûle. Son chef se dégage et voyant qu'un de ses camarades blessé ne peut plus assurer le commandement de son engin le remplace et continue la lutte.

Le combat continue à distance jusqu'à treize heures sans qu'aucun des deux adversaires cède du terrain. Cependant le peloton porté du sous-lieutenant A..., qui couvre la gauche du dispositif de la Colonne Volante en occupant un mouvement de terrain à quelque trois cents mètres plus à l'Ouest, signale le débouché d'un bataillon d'infanterie allemand déployé sur la crête à huit cents mètres plus loin.

Ne disposant pas d'une infanterie suffisante pour s'opposer à cette nouvelle menace, le commandant de colonne décide de se replier sur Bir, Ahmar. Il rappelle le détachement C..., qui continue à surveiller les arrières et reporte l'ensemble de ses forces aux abords de la route de Médénine. Le mouvement s'effectue par le lit de l'oued Gragour et se termine vers quatorze heures trente, sans perte. L'après-midi se passe à échanger des coups de canons sur tout véhicule qui quitte imprudemment son abri. Une AM est encore touchée par le tir ennemi et un équipage d'AC perd le brigadier marocain Dj..., décapité par un éclat d'obus.

A la tombée de la nuit, le Commandant de la Colonne, estimant qu'il ne dispose pas assez d'infanterie pour rester au contact de l'ennemi, demande au Commandant de la 4e Brigade Blindée Légère l'autorisation de se replier à cinq ou six kilomètres en direction de Foum-Tatahouine. Cette autorisation lui est accordée et la Colonne Volante se retire sur sa nouvelle position après avoir détruit tout le matériel qui ne peut être ramené.

Le lendemain, 7 mars, nous apprenons que l'attaque de Rommel a été repoussée partout. Les pertes allemandes ont été particulièrement élevées devant le secteur de la 201e Brigade de la Garde, où les Panzer Divisionen perdirent près de cinquante chars. La Colonne Volante compte à son tableau de chasse vingt-trois pièces dont deux autos-moteurs de 75 PAK et trois AM. Elle-même perdit dans le combat quatre AM, deux AC et quatre chars dont deux par accident mécanique. Les pertes en hommes sont de quatre tués, six blessés et quatorze disparus. Parmi ces derniers, douze appartenaient au peloton de l'Aspirant C... qui, dès le début de l'action, isolé dans une vallée, fut coupé du reste de la Colonne. Deux jours plus tard, l'Aspirant C..., nous rejoint ramenant avec lui trois de ses hommes, dont un blessé. Nous apprendrons ainsi que le groupement qui nous était opposé était le groupe de reconnaissance Kiel, notre vieille connaissance d'EI Himeimat.

Vers midi, la liaison est prise avec le groupe de reconnaissance de la 2e Division Néo-Zélandaise à Bir Ahmar. L'ennemi s'est replié, mais avant de se retirer, il a eu le temps de semer des mines un peu partout. Nous perdons encore une autocanon et deux hommes blessés, dont le maréchal des logis V..., qui la veille détruisit une A.M. allemande en tirant sur elle à cent mètres, le dernier obus de son coffre.


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Dernière mise à jour le dimanche 26 avril 2009


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