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L'épopée des Marmandais rejoignant la France libre Source :
Pierre Labarthe, du haut de ses 91 ans, est un livre d'histoire ouvert à lui tout seul. Sa vie, notamment en tant que chauffeur de la caravane du général Leclerc, de 1943 à 1946, est un véritable roman d'aventure. De la Seconde Guerre mondiale, si le caporal Labarthe n'a pas tout connu, il en a vu beaucoup : la fuite, la prison, l'Afrique, le débarquement en Normandie, la libération de Paris, et même la chute du Nid d'aigle. Et tout a commencé à Marmande.
« Mes parents étaient propriétaires d'une station-service, sur la route de Bordeaux, et j'étais mécanicien. En septembre 1942, lorsque les Allemands sont arrivés, ils ont réquisitionné la station, je n'avais donc plus de travail, et je suis allé en chercher dans la région de Toulouse. Mais en décembre, mon père m'a appelé pour me dire que les gendarmes de Marmande me cherchaient, pour que je parte travailler en Allemagne. Je suis rentré dire discrètement au revoir à mes parents, et j'ai décidé de partir pour l'Afrique rejoindre les Forces françaises libres. »
Les copains Marmandais
Dans le train qui l'emmenait vers Toulouse, Pierre croise un autre Marmandais, Robert Charrue. Ils se mentent mutuellement sur leurs intentions respectives, chacun s'inventant une connaissance à visiter dans la ville rose. Avant de s'avouer leur projet commun. Pierre Labarthe profita d'un arrêt en gare pour embrasser sa fiancée, qui deviendra sa femme quatre ans plus tard, avant de prendre la route d'Oloron-Sainte-Marie (64).
« En arrivant là-bas, sans aucun contrôle des Allemands, mon père m'avait dit d'aller dans le café en face de la gare, et demander Monsieur Dutuech. Après avoir vérifié que nous n'étions pas des espions, nous sommes passés dans l'arrière-boutique, où nous avons retrouvé une quinzaine d'autres Marmandais ! On se connaissait tous ! Il y avait Jean Monnereau, Jean-Louis Cazade, Jean-Jacques Henry, le fils Mathieu… Nous avions tous eu la même idée ! »
On est alors en février 1943, et traverser les Pyrénées à cette saison, même accompagnés de guides, n'était pas une mince affaire. « On a marché pendant plus de vingt-huit heures, en évitant les villages. Puis nous sommes arrivés à un pont, qui lui était surveillé. Nous nous sommes séparés en trois groupes, mais les derniers se sont fait tirer dessus. Aucun n'était Marmandais. Les guides nous ont laissés à l'entrée de la forêt d'Iraty, en nous conseillant de marcher encore pendant une heure, et de nous faire passer pour des marcheurs franco-canadiens si on nous posait des questions. Puis, ils nous ont pris tous nos papiers et notre argent, tout ce qui pourrait nous trahir. »
Captivité en Espagne
Le groupe était épuisé et affamé, et en monnayant des montres contre un repas, ils ont été dénoncés par un Espagnol fidèle au régime de Franco. Commence alors une longue période de captivité. « Nous avons changé plusieurs fois de prison, nous étions maltraités, on ne nous donnait rien à manger, certains sont morts, nous mangions même la peau de l'orange qui constituait notre dîner. J'ai perdu 22 kilos, je suis tombé malade, j'ai failli mourir. »
Puis un matin, plus de 2 000 prisonniers français sont conduits dans les arènes de Malaga, et libérés. Des bateaux battant pavillon anglais, mais où les matelots parlent avec un fort accent marseillais, les prennent en charge, pour les conduire à Casablanca. Pierre et ses camarades s'engagent dans les Forces françaises libres.
« Je m'étais engagé en tant que chauffeur, et un matin, on m'a envoyé chercher la caravane du Maréchal Montgomery, qui l'offrait au général Leclerc. Je suis devenu le chauffeur personnel du général Leclerc jusqu'à la fin de la guerre.
De ses camarades Marmandais, Pierre a pris des nouvelles toutes ces années. Désormais seul témoin de cette épopée, il a été invité à enregistrer son récit exceptionnel au musée Jean-Moulin, à Paris, au mois d'avril prochain. laurent le mercredi 09 décembre 2015 - Demander un contact Recherche sur cette contribution | |