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"Notre famille a pu vivre grâce à leur courage" 7 Décembre 2012
En 1941 des Lussacois avaient fait passer la famille juive Guez en zone libre. Mathilde, seize ans à l’époque, a rencontré hier les descendants de ces Justes.
Le foyer logement de la Noiseraie, à Lussac-les-Châteaux, a accueilli hier après-midi une rencontre émouvante : celle de Mathilde Simone Furmansky-Guez, 87 ans, et des neveux et nièces des deux hommes qui ont permis à sa famille juive de fuir la zone occupée, en 1941.
Émile et Suzanne Guez ont quitté Paris avec leurs cinq enfants peu avant une rafle. Ils devaient trouver refuge chez un frère de Suzanne habitant Lussac, en zone libre. 71 ans après, Mathilde Simone se souvient encore du passage clandestin de la ligne de démarcation, à travers champs, avec sa mère et la petite Nicole, onze mois. « On avait peur qu'elle pleure, ma mère la gardait au sein et lui donnait un peu de chocolat pour la calmer ».
Neuf mois à Lussac
Les résistants qui les ont fait passer, c'est Joseph Bernard, facteur à Saint-Julien l'Ars (1) et Julien David, le garde champêtre de Lussac. Deux « taiseux » se souviennent en souriant leurs neveux et nièces : « Ils n'ont jamais dit qu'ils avaient fait passer des gens ». « Ils n'ont jamais été recensés comme résistants », précise Jean-Claude Corneille, élu de Lussac qui s'est beaucoup investi dans les recherches historiques avec la famille Guez-Furmansky (lire par ailleurs).
La famille Guez a passé neuf mois à Lussac. « Tout le monde savait que nous étions juifs mais personne n'a parlé », souligne Mathilde Simone. A la demande de son père, l'adolescente a même repassé la ligne deux fois, pour récupérer des affaires dans l'appartement familial. A l'aller, elle a été escortée par un certain André Lemoine, dont personne n'a retrouvé la trace à ce jour. A Paris, elle a trouvé des scellés sur l'appartement. La famille avait été dénoncée et elle a dû fuir. De retour à Poitiers, elle retrouve Joseph Bernard, qui lui donne le livret de famille. En se faisant passer pour sa sœur cadette, Mathilde Simone dupe les policiers et rejoint les siens. En juin 1942, les Guez reprennent la route, pour l'Isère, Marseille puis la Tunisie, libérée six mois plus tard. Mathilde et son frère aîné, Félix, s'engagent dans les Forces françaises libres. Il part en Cyrénaïque, elle se retrouve dans les transmissions. Ils reviennent en France en 1944 sous l'uniforme… et retrouvent l'appartement parisien occupé par des collaborateurs.
Les cinq enfants Guez sont encore tous vivants : « Sans le courage de ces deux hommes, notre famille aurait sans doute été déportée ».
(1) Arrêté en 1944, torturé et emprisonné jusqu'à la Libération. laurent le mercredi 09 décembre 2015 - Demander un contact Recherche sur cette contribution | |