Georges Béchamp - Les Français Libres

Les Français Libres, de juin 1940 à juillet 1943

 
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Georges Béchamp



Naissance : 1886 - Saint Germain en Laye (78)

Activité antérieure : liberal / cadre

Point de départ vers la France Libre : Orient

Engagement dans la France Libre : Chine en juillet 1940

Affectation principale : Administration / affectation spéciale

Grade atteint pendant la guerre et spécialité : Commissaire

Décès à 57 ou 58 ans - 20 juillet 1944 - Saigon, Indochine

Mort pour la France

Dans la liste d'Henri Ecochard V40 : ligne 4110



Georges Béchamp - son Livre ouvert !
 

Docteur BECHAMP

" Bechamp était une personnalité reconnue comme telle en Chine. Il s’y était fixé après la Grande Guerre. Docteur en médecine et Consul de France, ce compatriote de Colette comptait des savants et des lettrés dans sa famille, dont le chimiste Antoine Bechamp et la poétesse Lucie Delarue-Mardrus.

C’était un érudit passionné de tout : sciences, littérature, philosophie, langues vivantes et mortes, arts, artisanat, civilisations et techniques nouvelles. Il correspondait régulièrement avec des savants comme Paul Langevin et le Père Theilhard de Chardin. L’illustre Jésuite ne manquait pas de visiter Bechamp à l’occasion de ses missions d’étude en Chine : il était reconnu comme un des grands Français d’Extrême-Orient où il était considéré comme un sage; la consécration suprême.

Homme universel, Bechamp se proclamait athée, mais n’en conserva pas moins qu’un seul livre en prison : une Bible en hébreu qu’il annotait en grec ancien. Elle ne le quittait jamais et il la lisait et relisait. Le chinois était une des nombreuses langues qu’il parlait; ce qui l’avait amené à exercer la fonction de Consul de France à Tchang-tchéou. Ses nombreuses occupations lui prenaient beaucoup de temps et avaient sans doute nui à sa santé. Dès Juin 1940, cet homme peu conformiste, et assez frondeur, se rallia à la France Libre que venait de créer le Général De Gaulle et mit son consulat au service des "Free French".

Il était de passage à Hong Kong lors de l’attaque japonaise de Décembre 1941. Il y fut pris au piège des combats et vécut la capitulation britannique, après que la concession eut été privée d’eau. Il suivit alors le sort de la communauté française de la Concession : les Japonais l’embarquèrent sur un paquebot nippon qui transportait nos compatriotes en Indo-Chine. Cela se passait en Février 1942. Il y avait au moins six mois que les Japonais savaient que le Docteur Bechamp était un "agent de la France Libre". Malgré cela et probablement à cause du réel respect que leur inspirait ce savant-philosophe, les Nippons ne lui causèrent aucun ennui et affectèrent de le considérer comme un Français entre d’autres.

L’intention du docteur était de profiter d’une escale à Kouang-tchéou-wan, territoire occupé par les Japonais mais sous souveraineté nominale de la France, pour rallier Tchoung-king : ses amis chinois lui auraient facilité l’opération. C’était compter sans la police politique mise en place par le gouverneur-général de l’Indo-Chine, dont dépendait ce territoire proche. Les autorités de Vichy en Extrême-Orient n’eurent pas la délicatesse des Nippons en cette occasion. Une vedette française accosta la coupée du navire japonais et vint y réclamer le Docteur Bechamp, qui fut amené par des gendarmes français. Son voyage se termina dans une cellule de la Maison Centrale de Hanoï.

La Cour Martiale le condamna à 15 ans de travaux forcés et aux peines annexes : vu son âge, cela correspondait à la perpétuité. A 55 ans, c’était un vieil homme en paraissant dix de plus. Il fut incarcéré comme un malfaiteur, sans considération pour son état physique déplorable, ni pour le capital moral qu’il représentait pour la France dans ce pays qui respecte les érudits et vénère les vieillards. L’Amiral Decoux qui forgea sa propagande sur l’image du "vieux maréchal au visage rose et à la moustache blanche" - et qui fulminera en 1949 à propos de la préservation, vis-à-vis des Indochinois, de l’image des Français éminents - ne se soucia guère du cas de Bechamp.

En captivité, la santé précaire du savant se détériora encore plus et il fallut se décider à l’hospitaliser. Le vieux docteur, qui n’était pas encore à retrouver un peu de santé, fut ramené en prison sur instructions du Gougal, à la suite de l’évasion de Robert et aussitôt après. Il n’y eut pas de réaction du directeur de l’hôpital Lanessan à la suite de cette mesure de représailles envers un malade grave : ce médecin de très haut grade se montra tout aussi pusillanime lorsque des aviateurs américains hospitalisés dans ses services furent livrés aux Japonais, sur un brancard; en dépit de la souveraineté française toujours proclamée de part et d’autre, mais toujours bafouée.

D’ordre du Gougal, on s’inquiétait parfois de ses desiderata, mais ce n’était qu’une feinte puisque l’ordre était de n’y pas donner suite. Bechamp ne quittait pas la cellule n° 1 où se trouvait déjà Pierre Boulle. Celui-ci put apprécier l’homme extraordinaire que l’amiral-gouverneur faisait mourir lentement dans ses geôles, en connaissance de cause. Atteint de déformations de la colonne vertébrale, l’estomac et les intestins malades, Bechamp ne pouvait véritablement pas se mouvoir. Même pour de minimes déplacements dans la cellule, il fallait le porter plus que le soutenir. On devait l’aider à se déshabiller. Il était pratiquement toujours couché, mais son intelligence demeurait intacte. Il se nourrissait mal, son estomac ne pouvant accepter qu’un peu de riz. Il était tellement pitoyable, que le gardien-chef, malgré les ordres draconiens reçus et rappelés continuellement, prit sur lui de lui donner un oreiller.

Il fallut pourtant bien l’évacuer sur l’hôpital, de crainte de le voir expirer en prison. Il trouva encore la force, avant d’être évacué, de donner des conseils à Robert qui essayait de se faire hospitaliser pour s’évader : il lui indiqua comment simuler une maladie cardiaque et autres maladies graves. Il y avait longtemps que tous les médecins l’ayant visité avaient conclu à la nécessité absolue de l’hospitaliser d’urgence : en cette période d’autoritarisme pointilleux et rancunier, personne ne voulait en prendre l’initiative sans instructions formelles de l’amiral-gouverneur et nul ne voulait les réclamer. Bechamp continuait à s’affaiblir.

L’opinion du savant sur ceux qui avaient en charge l’ordre en Indo-Chine se résumait en cette phrase qu’il prononça devant ses camarades : "Ces gens-là sont des misérables !". Ils allaient en apporter la démonstration. Son sort fut en fait dépendant de la défaite de Rommel en Lybie : la défaite du "Renard du désert", dont la renommée avait été portée jusqu’à Hanoï et Saïgon par les propagandes conjuguées de Berlin et de Vichy, causa une surprise qui fut salutaire pour certains. Le repli de l’Afrikakorps tournait à la déroute; laissant entrevoir un autre horizon qu’un mur d’oriflammes frappées de la svastika. Quelqu’un osa "demander des instructions" au Gougal.

Bechamp ne mangeait pratiquement plus rien de ce qui lui était présenté, et il ne se levait plus. Les consignes étaient cependant toujours appliquées : s’enquérir de ses desiderata et n’en pas tenir compte. L’autorisation de l’amiral-gouverneur vint enfin et le prisonnier fut hospitalisé à Lanessan. La phobie de l’évasion, malgré l’état grabataire du malade, était telle que Decoux ordonna, presqu’aussitôt, d’évacuer Bechamp sur Saïgon. On devine ce que fut un voyage de deux jours et nuits, dans un tel état et dans de telles conditions. A l’hôpital de la capitale de la Cochinchine, il fut enfermé dans les locaux disciplinaires.

Cet acharnement, qui ne cède en rien à celles de Darnand en France, étonne aujourd’hui; d’autant plus que les anciens responsables de l’époque expliquent les incarcérations de "dissidents" par les nécessités du "double jeu", mais en oubliant de dire ce que furent les incarcérations. Rien ne les obligeait à être inhumain, voire barbare. Les Nippons ne se souciaient pas de ces questions; puisque Decoux osa des libérations en fin 1944 au moment où les Japonais étaient particulièrement attentifs à son comportement.

La façon dont furent traités les prisonniers gaullistes s’apparente aux pratiques des "Japs" telles que nous les avons expérimentées après le 9 Mars 1945, les coups en moins : détruire l’individu par les privations et les mauvais traitements. L’amiral a défini sa vision de la justice dans son télégramme n° 7850 du 21 Décembre 1941, adressé à Vichy juste avant l’arrivée de Bechamp à Hanoï : "une répression qui devrait être rapide et énergique". Pour cela il donna des directives à sa police et aussi aux juges; dans ce cadre fut sanctionné le Commandant Roy, commissaire du gouvernement qui trouvait des circonstances atténuantes aux justiciables.

En Novembre 1943 seulement, alors que le débarquement allié en Italie avait réussi, on osa enfin faire admettre Bechamp dans une salle de l’hôpital Grall : en 3ème classe. Ce ne fut d’ailleurs réalisé qu’après de longues discussions, mises en garde et autres dégagements de responsabilité; à l’encontre d’un pauvre homme à qui la maladie interdisait de bouger de son lit. Il n’était plus qu’une ombre et l’issue fatale et proche avait fini par décider de ne pas le renvoyer en prison. Les autorités voulaient se donner bonne conscience et éviter que leur manque d’humanité soit trop flagrant si le décès survenait à la Maison Centrale : la peur les commandait.

Bechamp se retrouva sur une couche qui ne changeait guère avec celle de la prison, isolé et non en salle commune pour éviter qu’il se livre à la propagande; alors que le front de Normandie venait de céder devant les Américains… Pendant sa dernière semaine de vie, quelques rares personnes furent autorisées à le visiter, sous haute surveillance : il apprit ainsi que l’heure de la victoire et de la libération avait sonné pour sa patrie, du Général Sabattier connu en Chine.

Le 20 Juillet 1944, le Docteur Bechamp mourut dans la solitude à l’hôpital Grall à Saïgon. Robert était alors hospitalisé dans ce même hôpital, dans une cellule à moins de 30 mètres de son ami : il demanda, à plusieurs reprises et en vain, d’aller se recueillir devant la dépouille de Bechamp. On finit par autoriser une femme à prendre en charge les derniers devoirs : future épouse d’un officier de Leclerc, qui deviendra le Président du Conseil de Paris, Chavanac, elle faisait partie de la Résistance (Médaille Militaire, Croix de Guerre, Medal of Freedom, Médaille de la Résistance).

Le corps fut mis en bière en présence de son avocat, Me Jacquemard, et de deux relations de Chine dont le Général G. Sabattier. Le convoi funèbre fut suivi par quelques dizaines de personnes, dont la plupart jugeaient utile de faire enfin acte d’indépendance. Sur le cercueil, quelques fleurs nouées de tricolore. Ce même jour, avait lieu l’attentat contre Hitler et la chevauchée libératrice commençait en France; cependant l’administration de l’amiral demeurait toujours aussi rancunière. Ses membres s’étonneront, fin 1945, que cela n’ait pas été oublié; bien que les sanctions aient été très minimes, particulièrement envers les grands responsables.

Le Docteur Bechamp est mort de sévices et de manque de soins, d’ordre supérieur, mais l’administration de Vichy en Indo-Chine se rendait bien compte de son infamie en la circonstance : elle informa la famille en laissant croire que ce savant avait été victime des Japonais. Sa seule parente, une cousine germaine, dut attendre 40 ans pour savoir la vérité. Alertée par mon récit paru dans le Journal des Combattants, elle vint à Paris : j’étais présent lorsque Madame Chavanac, dans son salon près de la Porte d’Auteuil, lui raconta les faits à son arrivée de Saint-Sauveur-en-Puisaye et que cette merveilleuse femme évoqua la façon dont elle apprit le décès du Docteur Bechamp.

Au nom d’un régime agonisant et honni, l’Amiral-Gouverneur-Général Decoux avait triomphé d’un vieil honnête homme… "

"En cache" : 

laurent le mercredi 02 septembre 2009 - Demander un contact

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Mémoires de guerre, Charles de Gaulle (L'Appel)

Télégramme du Comité national
à Délégation France Libre, à Washington,
et à Haut-commissaire de France, à Nouméa.
Londres, 13 novembre 1941.
Voici les directives du Comité national pour les négociations à conduire avec le Gouvernement américain concernant l'établisse­ment des routes aériennes au Pacifique.
1° L'aménagement de l'infrastructure nécessaire (bases aériennes, radio, terrain de secours) devra, dans chaque cas, donner lieu à un accord avec les autorités locales de la France Libre.
2° Les installations de carburant et de matières inflammables devront être établies conformément aux règles françaises de sécu­rité.
3° Les installations ainsi réalisées demeureront propriété fran­çaise.
4° La circulation, le survol et la police générale des aérodromes
la politique générale du Comité national il en sera référé au Comité.
Je fais informer Escarra, Baron, Willoquet, Béchamp, Brénac. Je fais part, en outre, de ce qui précède aux gouvernements étrangers intéressés.

laurent le mercredi 02 septembre 2009 - Demander un contact

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Mémoires de guerre, Charles de Gaulle (L'Appel)

" J'étais informé des développements de cette grave affaire, non seulement par les Anglais et les Hollandais à Londres, mais aussi par les représentants dont la France Libre disposait aux principaux carrefours du monde : Schompré, puis Baron et Langlade, à Singapour ; Garreau-Dombasle à Washington ; Egal à Shanghaï ; Vignes à Tokyo ; Brénac à Sydney ; André Guibaut, puis Béchamp, à Tchoung-King ; Victor à New-Delhi. Il m'apparut que les diverses politiques étaient, en l'occurrence, aussi gênées que complexes, mais qu'en tout cas personne ne ferait rien pour aider l'Indochine française à résister aux Japonais."

Jacques Ghémard le mercredi 02 septembre 2009 - Demander un contact

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Dernière mise à jour le jeudi 05 décembre 2019

 

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